Prêt immo : cette loi qui veut booster votre pouvoir d'achat

22 octobre 2019

Le sénateur socialiste Martial Bourquin est à l'origine de l'amendement censé relancer la concurrence sur le marché de l'assurance emprunteur. Depuis janvier 2018, vous pouvez changer d'assurance de prêt plusieurs années après avoir souscrit un crédit immobilier. Mais, face aux difficultés de mise en œuvre de cette mesure, Martial Bourquin porte une proposition de loi avec l’aval du gouvernement.

Les propositions de loi émanant de député ou de sénateur sont rarement couronnées de succès. Pourquoi la vôtre a-t-elle des chances d’êtres adoptée, le 23 octobre au Sénat ?

Martial Bourquin : « Parce que le Sénat et l’Assemblée ont adopté voici 2 ans la faculté de résiliation annuelle de l’assurance emprunteur. Il s’agissait de l’amendement Bourquin, la continuité de la loi Hamon. Or, malgré le vote de cet amendement, l’assurance emprunteur reste à 87% la propriété des banques ! Et cette absence de concurrence a un impact très défavorable sur les prix, au détriment des consommateurs, car les banques appliquent des marges très significatives sur ce produit. Enfin, concernant cette proposition de loi, il faut savoir qu’elle a été amendée en commission au Sénat en concertation avec le gouvernement. »

Qu’est-ce qui manque à votre amendement, entré en vigueur en janvier 2018, pour relancer la concurrence ?

M.B. : « Quand un texte législatif est voté, il faut toujours veiller à son application. Or, là, elle pose problème ! 30% des emprunteurs demandant une résiliation d’assurance n’obtiennent aucune réponse de la part de leur banque. Et, quand ils obtiennent une réponse, dans 20% des cas, la banque répond que l’adresse du courrier n’est pas la bonne ! Le Comité consultatif du secteur financier (CCSF) a relevé cette mauvaise volonté des banques : des bonnes pratiques ont été édictées en novembre 2018, harmonisant notamment la date échéance à prendre en compte pour la résiliation annuelle. Mais, là encore, ces bonnes pratiques ne sont pas bien appliquées ! »

La « date unique » d’échéance annuelle est censée être en pratique dans toutes les banques depuis juillet 2019… L’harmonisation voulue par le CCSF n’a-t-elle pas porté ses fruits ?

« 30% des emprunteurs voulant résilier n’obtiennent aucune réponse »

M.B. : « Non. Et on peut se demander pourquoi. Probablement car cette harmonisation n’est pas inscrite dans la loi. D’où ma proposition de loi, qui fige cette échéance à la date anniversaire de la signature de l’offre de prêt et qui porte d’autres mesures contraignantes pour les banques. Ce texte prévoit aussi une amende administrative pouvant grimper jusqu’à 15 000 euros en cas de refus abusif ou en cas d’absence de réponse à une demande de résiliation. Cette proposition de loi doit ainsi régler d’une part le problème du flou entourant la date d’échéance annuelle, et d’autre part le cas des absences de réponse. »

Outre l’harmonisation sur la date échéance et les sanctions administratives, quelles sont les autres mesures ?

M.B. : « Cette proposition de loi se veut simple et efficace. Elle oblige notamment les banques à fournir la fiche standardisée d’information (FSI) dans un délai de 10 jours faisant suite à toute demande de l’emprunteur, et ce sans aucuns frais. Car la FSI est un document essentiel pour l’emprunteur s’engageant dans une démarche de changement d’assurance. Le texte initial prévoyait aussi la pratique du name and shame pour les banques ne respectant pas ce droit de résiliation annuel, mais cette possibilité est finalement déjà prévue dans d’autres textes : il n’était pas nécessaire de l’inclure dans la loi. Par ailleurs, avec cette loi, un rapport sur l’effectivité de la concurrence devra être remis chaque année au Parlement et au gouvernement. Reste un point crucial : notre proposition de loi s’applique à tous les contrats, y compris les contrats en cours de remboursement ! »

Quels ont été les principaux points de négociation avec le gouvernement ?

« J’ai bon espoir que la loi puisse être mise en œuvre dès le premier semestre 2020 »

M.B. : « Les échanges avec la rapporteure de la commission Elisabeth Lamure [sénatrice LR, NDLR], le Trésor et le gouvernement ont été extrêmement constructifs. Les modifications apportées sur le texte visent surtout à le rendre plus efficace : cela a permis d’améliorer cette proposition de loi. »

Si ce texte est adopté par le Sénat le 23 octobre, quand pourrait-il entrer en vigueur ?

M.B. : « Tout dépend de l’Assemblée nationale. Mais il faut noter que le gouvernement n’est pas opposé à ce texte, et le ministre du Logement Julien Denormandie a même déclaré qu’il faut améliorer l’information aux emprunteurs sur la question de l’assurance de prêt immobilier. Si l’Assemblée étudie ce texte rapidement, j’ai bon espoir que la loi puisse être mise en œuvre dès le premier semestre 2020. »

Les banques accaparent toujours plus de 85% du marché, les assureurs alternatifs pesant donc moins de 15%. Jusqu’à où voulez-vous abaisser cette statistique ?

« Comment expliquer que les banques se prévoient une telle marge sur l’assurance initiale ? C’est inadmissible ! »

M.B. : « Je ne travaille ni pour les assureurs, ni pour les banques. Mon seul souci, c’est le prix ! Les tarifs sont anormalement hauts. Depuis que la résiliation annuelle est en vigueur, on m’a rapporté des cas extrêmement révélateurs : en changeant d’assureur, certains ont réussi à réduire leur coût global de leur assurance de prêt de plus de 10 000 euros, voire parfois 20 000 euros ! Dans certains cas, des emprunteurs obtiennent une couverture équivalente en ne payant que 20% du prix initial ! Comment expliquer que les banques se prévoient une telle marge sur l’assurance initiale ? C’est inadmissible ! Remettre de la concurrence sur le marché de l’assurance emprunteur est réellement une mesure de pouvoir d’achat pour les Français. »
Source : cbanque.com

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